6 avril 2022 : Journée internationale du sport au service du développement et de la paix


David Sassoli and Gianni Infantino« La FIFA est un exemple dans de nombreux domaines: elle a une attitude volontariste sur des sujets tels que la culture et le respect des autres; elle est bien entendu présente depuis très longtemps en Europe, mais son influence se fait sentir sur tous les continents. C’est pourquoi le monde entier s’intéresse à ce que fait la FIFA, et à ce que nous pouvons faire ensemble, avec elle, pour promouvoir ces valeurs dans le monde. » David Sassoli, ancien président du Parlement européen, prend part à une conférence de presse conjointe avec Gianni Infantino, président de la FIFA, le 11 décembre 2019. Ils se rencontrent alors que la controverse sur la Coupe du monde 2022 prend de l’ampleur © Union européenne 2019 – Parlement européen

Mise en perspective historique : la Coupe du monde de la FIFA 1978 en Argentine et les Jeux olympiques d’été 1980 à Moscou

Les grandes manifestations sportives et la politique sont étroitement liées. La Coupe du monde de la FIFA 1978 en Argentine et les Jeux olympiques d’été 1980 à Moscou sont des exemples historiques bien connus de grands événements sportifs mis à profit par des régimes à des fins de propagande politique. La Coupe du monde 1978 a eu lieu environ deux ans après le coup d’État mené par des militaires argentins, qui a conduit à l’instauration d’un régime conservateur, et la répression violente que ce dernier a exercée contre ses détracteurs. Quant aux Jeux olympiques d’été 1980 à Moscou, ils ont été les premiers à être organisés en Europe orientale et les premiers à se tenir dans un pays socialiste. Les Jeux olympiques d’été 1980 ont en outre été à l’origine d’un boycott sans précédent dans l’histoire des grands événements sportifs: 60 pays ont ainsi décidé de ne pas participer aux Jeux pour protester contre l’invasion de l’Afghanistan par l’Union soviétique, qui avait eu lieu en décembre 1979.

L’implication du Parlement européen dans les débats (EN) sur la réponse politique à apporter à ces deux grands événements sportifs est un aspect peu connu de cet épisode. Une analyse des débats menés sur ces événements montre que le Parlement s’est principalement concentré sur les violations des droits de l’homme dans les deux pays organisateurs. Le Parlement a estimé qu’il était de sa responsabilité morale d’attirer l’attention du public sur les violations des droits de l’homme en Argentine et en URSS, alors que ces deux pays étaient sous les feux des projecteurs en tant qu’organisateurs de ces grands événements sportifs. Le Parlement s’est aussi et surtout appuyé sur cette responsabilité morale en matière de droits de l’homme pour prendre des mesures d’ordre politique: en effet, à cette époque, la manière de réagir aux grands événements sportifs avait une importante dimension idéologique. L’invasion de l’Afghanistan par l’URSS et l’arrestation d’Andreï Sakharov ont incité le Parlement à appeler au boycott des Jeux olympiques 1980 à Moscou, comme l’avait fait l’administration Carter aux États-Unis. En ce qui concerne la Coupe du monde 1978, un consensus s’est également dégagé quant à la nécessité de prendre des mesures politiques contre les violations des droits de l’homme perpétrées dans l’État sud-américain; la commission politique a notamment pris la décision d’organiser une audition publique.

Ni le boycott des Jeux olympiques de Moscou ni l’audition publique sur les violations des droits de l’homme en Argentine, qui a eu lieu quelques jours seulement avant le début de la Coupe du monde, n’ont fait évoluer la politique dans l’un ou l’autre de ces pays. Ces débats, et en particulier l’audition publique, ont néanmoins été suivis d’effets, notamment en ce qui concerne les mesures politiques (EN) adoptées par le Parlement européen à l’égard des grands événements sportifs dans les pays peu respectueux des droits de l’homme. L’audition publique sur les violations des droits de l’homme en Argentine, la toute première au Parlement européen ne relevant pas de la compétence de la Communauté européenne, a suscité un grand intérêt médiatique en Europe occidentale. Tous les grands quotidiens des principaux États membres de la Communauté ont rendu compte des déclarations des intervenants. En outre, les autorités argentines ont réagi à l’audition publique: le gouvernement militaire argentin a en effet manifesté son profond désaccord avant même l’audition. Au cours de l’audition publique, John Prescott et d’autres députés européens ont demandé la libération de la figure de proue du mouvement argentin pour la défense des droits de l’homme, qui a été libérée par les autorités argentines un jour seulement après l’audition publique. On peut donc considérer que l’audition publique organisée par le Parlement européen a contribué à faire pression sur le régime argentin pour obtenir cette libération. Par la suite, les auditions publiques du Parlement européen ont régulièrement été utilisées et se sont révélées efficaces pour enquêter sur les violations des droits de l’homme dans les pays qui organisent de grandes manifestations sportives et protester contre ces violations.

Consultez cette note d’information (EN) du service de recherche du Parlement européen pour en savoir plus sur la réaction du Parlement face à ces événements sportifs.

La politique européenne et le sport aujourd’hui : la Coupe du monde de la FIFA 2022 au Qatar

En décembre 2010, la FIFA a désigné le Qatar comme pays organisateur de la Coupe du monde 2022. Pour s’y préparer, le pays s’est lancé dans un vaste programme de construction, pour lequel il aurait fait appel, selon les estimations, à un million de travailleurs migrants. Contrairement aux expatriés – peu nombreux – venus de pays occidentaux et d’autres États du Golfe, les migrants asiatiques et africains vivent et travaillent dans des conditions difficiles. Environ un million d’entre eux travaillent dans le secteur de la construction, et 100 000 sont travailleurs domestiques. Le système de la kafala (parrainage), qui est largement utilisé dans les six États membres du Conseil de coopération du Golfe et confère un pouvoir disproportionné aux employeurs, suscite en particulier des inquiétudes, car il donne lieu à un abus généralisé des droits des travailleurs migrants.

White Ribbon CampaignersCampagne du ruban blanc contre la violence à l’égard des femmes dans la perspective de la Coupe du monde de football © Union européenne 2018 – Parlement européen

Les préparatifs de la Coupe du monde ont mis en lumière le mauvais traitement réservé par le Qatar aux travailleurs migrants. En réponse à la pression internationale, le Qatar a introduit d’importantes modifications dans la législation pour améliorer la situation de ces travailleurs, des mesures qui ont été saluées par l’Union. Toutefois, selon les organisations de défense des droits de l’homme, le pays doit aller plus loin pour mettre un terme aux abus. Même si le Qatar a entrepris de démanteler le système de kafala, des pans importants de ce système restent en place. En outre, il reste difficile de faire respecter une législation plus favorable aux travailleurs.

Depuis 2008, le Parlement européen a adopté quatre résolutions sur la situation des travailleurs migrants au Qatar et a demandé au Qatar de mettre un terme à la « situation déplorable » des travailleurs migrants et d’empêcher que les préparatifs de la Coupe du monde 2022 ne soient « entachés par des allégations de travail forcé ». En février 2014, la sous-commission « droits de l’homme » du Parlement européen s’est penchée sur la situation des migrants qui travaillent à la construction des stades de football pour la Coupe du monde 2022 au Qatar. Lors de l’audition organisée par la commission, le footballeur français Zahir Belounis, coincé au Qatar pendant plus de deux ans, a demandé aux représentants de la FIFA présents à l’audition de faire un véritable effort pour mettre fin au système de la kafala. À cet égard, les auditions publiques du Parlement européen contribuent à faire pression sur les associations sportives internationales et nationales afin qu’elles accordent une attention particulière aux violations des droits de l’homme lorsque des pays peu respectueux de ces droits accueillent de grandes manifestations sportives. Cette audition publique, ainsi que d’autres actions menées par le Parlement, notamment une lettre ouverte signée par 60 députés issus de cinq groupes politiques différents et invitant les gouvernements de l’Union à se tenir à distance de la Coupe du monde 2018 en Russie, s’inscrivent dans une tradition qui trouve son origine dans les débats et les actions politiques du Parlement européen concernant la Coupe du monde 1978 en Argentine et les Jeux olympiques 1980 à Moscou.

Committee on Culture and Education
Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’Union est habilitée à soutenir, coordonner ou compléter les activités des États membres dans le domaine du sport. Au sein du Parlement européen, la politique sportive est placée sous la responsabilité de la commission de la culture et de l’éducation. Ici, la commission se réunit pour débattre des priorités de la présidence bulgare du Conseil avec Krasimir Valchev, ministre de l’éducation et des sciences, Krasen Kralev, ministre de la jeunesse et des sports, Boil Banov, ministre de la culture, et Petra Kammerevert, présidente de la commission © Union européenne 2018 – Parlement européen