Les noms « derrière » les bâtiments : Paul-Henri Spaak (1899-1972)


European Parliament Spaak Building, BrusselsVue aérienne du bâtiment Paul-Henri Spaak à Bruxelles © Architectes: Vanden Bossche SPRL, CRV S.A., CDG S.P.R.L., Studiegroep D. Bontinck; Façade et hémicycle © Arch. M. Boucquillon, Belgique; Image © Union européenne 2019 – Parlement européen

Visionnaire, homme d’État talentueux et Premier ministre belge

Comme nombre d’autres fondateurs de l’Europe, Paul-Henri Spaak s’est lancé très tôt dans la bouillonnante sphère politique du début du XXe siècle. Il est né à Schaerbeek en 1899, dans une famille issue d’une lignée de notables politiques et littéraires. Mais contrairement à tant d’autres, ce n’est pas son père ni aucune autre figure masculine qui l’ont poussé dans les bras de la politique, mais bien sa mère.

AEn tant que sénatrice, sa mère, Marie Janson, a été la première femme parlementaire belge, en 1921. Elle avait choisi le Parti ouvrier belge (POB), loin des affiliations libérales de sa propre famille. Et c’est en suivant l’exemple maternel que Paul-Henri Spaak décida à son tour de rallier le POB. Les parcours du fils et de sa mère seront alors parallèles puisque, après l’interruption de la guerre, tous deux suivront ce parti dans sa mutation en Parti socialiste.

European Parliament Spaak Building, Brussels
Bâtiment Paul-Henri Spaak © Association des architectes du CIC : Vanden Bossche sprl, CRV s.A., CDG sprl, Studiegroep D. Bontinck; Image © Union européenne – Parlement européen

Ses débuts

Nombre de fondateurs ont fini en prison pour s’être opposés aux régimes totalitaires, et Paul-Henri Spaak n’a pas dérogé à la règle. Pendant la Première Guerre mondiale, il ment sur son âge pour s’engager dans l’armée belge. Arrêté par les Allemands, il est fait prisonnier de guerre et ne sera libéré que deux ans plus tard. Après 1918, il étudie le droit à l’Université libre de Bruxelles, puis devient avocat du barreau de Bruxelles.

C’est en 1932 que commence sa carrière politique. Représentant la jeune génération pacifiste et contestataire du POB, il est élu député de Bruxelles, devenant l’adversaire politique de son oncle, le libéral Paul-Émile Janson. Il devient ministre des transports et des communications de 1935 à 1936, puis ministre des affaires étrangères et Premier ministre de mai 1938 à février 1939, poste qu’il doit quitter pour revenir aux affaires étrangères dans le gouvernement d’union nationale d’Hubert Pierlot à la suite de l’entrée en guerre de la France et de l’Angleterre contre l’Allemagne. Il fait partie du gouvernement belge qui se reconstitue en exil à Londres en octobre 1940.

À son retour à Bruxelles en 1944, confirmé dans ses fonctions de ministre des affaires étrangères, il redevient Premier ministre dans les gouvernements d’après-guerre. Il négocie la participation de la Belgique au plan Marshall et la mise en place du Conseil de l’Europe. Il fait sa grande entrée sur la scène internationale en 1945 en tant que président de la première session de l’Assemblée générale des Nations unies et devient secrétaire général de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en 1956.

Paul Henri Spaak, Belgium's Premier and Foreign MinisterPaul-Henri Spaak, Premier ministre belge et ministre des affaires étrangères, 19 juillet 1948 © AP 1948 – Redistribution de l’image non autorisée / Commission européenne / Parlement européen

Sa contribution à l’Europe

La vision qu’avait Paul-Henri Spaak de la coopération européenne lui a valu le titre de cheville ouvrière du projet d’intégration européenne. Même si une grande partie de l’Europe était en ruines après la Seconde Guerre mondiale, Paul-Henri Spaak y voit une occasion d’en faire à nouveau un continent puissant, grâce à une coopération économique et politique, pressentant le potentiel de l’unification de l’Europe d’après-guerre. La création de l’Union douanière Benelux en 1944 (qu’il négocie avec ses homologues néerlandais et luxembourgeois pendant son exil à Londres) est d’ailleurs un bel exemple d’entente régionale né d’une idée simple, mais qui n’avait jamais été proposée ni concrétisée auparavant: la libre circulation des capitaux, des personnes, des services et des biens à l’intérieur des frontières de ces trois pays, une source d’inspiration pour l’intégration européenne.

Au début des années 1950, Paul-Henri Spaak est président de l’Assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). L’échec du projet de Communauté européenne de défense en 1954 est pour lui une vive déception. Avec ses homologues du Benelux et avec l’aide de Jean Monnet, Paul-Henri Spaak s’interroge sur les modalités d’une relance européenne.

En 1955, il préside la Conférence intergouvernementale chargée de l’étude de l’intégration sectorielle (transports et énergie) et du marché commun. Le « comité Spaak » aboutit à la rédaction d’un rapport qui sert de base pour la négociation de la création d’une Communauté économique européenne (CEE) et d’une Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom). C’est au nom de la Belgique que Paul-Henri Spaak signe, le 25 mars 1957, les traités de Rome qui instituent la CEE et Euratom.

Après son passage à la tête de l’OTAN, il redevient en 1961 ministre des affaires étrangères. Il plaide en faveur de l’adhésion du Royaume-Uni aux Communautés européennes et s’oppose à la politique européenne du général de Gaulle. « L’Europe de demain doit être une Europe supranationale », déclare-t-il pour contrer le nationalisme de certains.

Paul-Henri Spaak est présenté dans les livres d’histoire comme le moteur de l’intégration européenne. Il a cru en la réalisation d’un projet européen bien avant le début de la coopération économique et politique.

European Parliament Spaak Building, BrusselsBâtiment Paul-Henri Spaak © Association des architectes du CIC: Vanden Bossche sprl, CRV s.A., CDG sprl, Studiegroep D. Bontinck; Image © Union européenne – Parlement européen