Le premier chancelier de la République fédérale d’Allemagne
L’Union européenne dans laquelle nous vivons a été créée sous l’impulsion de nombreux visionnaires aux origines parfois bien différentes. Ils ont pu créer un espace de paix grâce à leur infatigable engagement en faveur de l’union, de la démocratie, du pacifisme et de la prospérité. Parmi les pères fondateurs, il en est un qui a profondément marqué l’histoire de son pays et par extension, celle de l’Europe. Il s’appelait Konrad Adenauer.
Né le 5 janvier 1876 à Cologne, dans une famille modeste de confession catholique, Konrad Adenauer opte pour une carrière dans le droit et l’économie, comme beaucoup d’autres Européens qui ont joué un rôle déterminant dans les institutions. Mais ce n’est pas ce qui l’a mis sur le chemin de sa future épouse, qu’il a rencontré dans un club de tennis en 1901. Marié trois ans plus tard, c’est grâce à sa belle-famille qu’il fait ses débuts dans la sphère très fermée de la politique, tout d’abord au sein de la municipalité de Cologne.
Talentueux et têtu
Ses idées et son engagement lui valent de devenir maire de Cologne en 1917. Extrêmement brillant, c’est le plus jeune maire de Prusse. Ses pairs louent sa détermination et sa ténacité dans sa manière d’aborder les sujets de grande ampleur, tels que la construction de la première autoroute allemande reliant Bonn à Cologne.
Konrad Adenauer était connu pour fuir les extrêmes, ce qui lui a valu de nombreuses diffamations par le parti nazi. Et c’est aussi ce qui l’a pratiquement ruiné, du moins dans un premier temps. En effet, en 1933, après la prise du pouvoir par les nazis, il fait ouvertement un pied de nez à Hitler en refusant de décorer la ville de croix gammées alors que le Führer y effectue une visite. Une « erreur » qui lui vaut d’être démis de ses fonctions. Ses comptes bancaires sont gelés et il se retrouve à la rue, sans emploi et fauché. C’est uniquement grâce à ses amis et à l’Église qu’il a pu traverser la guerre.
Arrêté à plusieurs reprises, il fait un court séjour en prison en 1934 après la « nuit des Longs Couteaux » qui installe les SS au pouvoir. Puis, après l’attentat contre Hitler du 20 juillet 1944 et jusqu’en novembre, Konrad Adenauer est enfermé dans la célèbre prison de la Gestapo à Brauweiler, près de Cologne.
Le grand retour
Après la guerre, il récupère avec l’appui des Américains son poste de maire de Cologne. Toutefois, le contrôle de la ville passe ensuite aux mains des Britanniques. Ceux sont eux qui le démettent à nouveau de ses fonctions car ils se méfient de celui qu’ils considèrent comme un « catholique réactionnaire ». Il se consacre alors à la création de l’Union chrétienne-démocrate (CDU). En 1949, il devient le premier chancelier de la République fédérale d’Allemagne (Allemagne de l’Ouest). Malgré ses 73 ans, Konrad Adenauer, que l’on appelait « Der Alte » (le « vieil homme »), occupera cette fonction pendant 14 ans. À l’apogée de sa carrière, il pensait que la politique étrangère deviendrait de plus en plus centrale.
Les deux Guerres mondiales ont eu une influence profonde sur Konrad Adenauer, qui a œuvré sa vie entière à l’instauration de la démocratie. Voyant l’Allemagne ruinée d’un point de vue politique, économique et moral, il est convaincu que l’intégration du pays dans la communauté des démocraties de l’Occident européen et chrétien résoudrait les problèmes de l’après-guerre. C’est d’ailleurs grâce à lui que l’Allemagne de l’Ouest intègre l’OTAN. Fervent défenseur de la Communauté européenne du charbon et de l’acier instituée après la déclaration Schuman du 9 mai 1950 qui place la France et l’Allemagne sur un pied d’égalité, il soutient le projet de Communauté européenne de défense, puis le traité de Rome qui institue la Communauté économique européenne et l’Euratom en 1957.
Ancien chancelier allemand et l’un des pères fondateurs de l’Union européenne, Konrad Adenauer, est décédé le 19 avril 1967. © Union européenne 1989 – Parlement européenLe plus grand
L’opinion de Konrad Adenauer sur l’Europe était simple: seule l’unification européenne éviterait le retour aux désastres fratricides du passé. Il se bat pour la réunification de l’Allemagne et pour la réconciliation du pays avec ses anciens ennemis, en particulier la France. En 1963, il atteint enfin son objectif : le traité de l’Élysée, aussi appelé traité « d’amitié », scelle la réconciliation franco-allemande et met un terme à la rivalité ancestrale entre les deux puissances. Konrad Adenauer a su redorer le blason d’un pays entaché par un extrémisme qui l’avait mis à genoux.
Un historien a d’ailleurs écrit à son sujet : « Konrad Adenauer est l’une des personnalités les plus marquantes de l’histoire de l’Europe. Pour lui, l’unité européenne n’était pas seulement un gage de paix, mais aussi une manière de réintégrer l’Allemagne post-nazie dans la vie internationale. L’Europe que l’on connaît n’aurait pas vu le jour sans la confiance qu’il a inspirée aux autres États européens grâce à la cohérence de sa politique étrangère. Ses actions sont aujourd’hui encore reconnues par les citoyens allemands, qui l’ont élu en 2003 ‘plus grand Allemand de tous les temps’. ».
Le bâtiment Konrad Adenauer est également le plus grand du Parlement: après l’ouverture des nouvelles ailes en 2020, le bâtiment qui accueille l’ensemble des services basés à Luxembourg couvre au total 250 000 m2.